Interview – Julie Charles Fondatrice d’EKOO

Julie Charles présidente d’EKOO et partenaire d’OPUS Fabrica vise à redonner au recrutement son essence première : une rencontre. Une rencontre authentique entre une entreprise et un candidat, entre une équipe et un futur collègue, entre un professionnel et son nouveau rôle dans l’entreprise.

 

 Pouvez-vous nous parler vous et de la création de d’EKOO ? Comment définiriez-vous votre raison d’être ?

Je ne viens pas du tout de cet univers. Je viens de la campagne et le monde du travail est un monde que j’ai découvert au fil de mes différents postes. Je n’avais pas cette culture-là, ni la culture « corporate », encore moins entrepreneuriale. Mon premier métier, c’était de castrer le maïs dans les champs. C’était vraiment un autre univers.

Ensuite, dans mes postes en ressources humaines (RH), j’ai toujours accompagné des transformations d’entreprise, soit parce que la société était en croissance, soit parce qu’il fallait harmoniser des pratiques à travers 50 filiales, soit parce qu’il s’agissait de restructurations. Et dans une transformation, l’humain est au cœur. En tout cas, d’après mon expérience, les transformations qui réussissent, même celles liées à la décroissance, peuvent toujours préserver l’humain. Mais cela dépend de la manière dont on s’y prend. Ça m’a énormément marqué au cours de mes expériences.

Cela m’a également inspiré la création de ce que je fais aujourd’hui avec EKOO. L’idée était de se demander : quel est le rôle des RH dans l’épanouissement au travail, tout en soutenant la performance de l’entreprise ? Comment éviter une performance obtenue au prix de la souffrance au travail ? Notre responsabilité est de faire en sorte que les collaborateurs se sentent à leur place, qu’ils puissent continuer à se développer et qu’ils se sentent bien lorsqu’ils viennent travailler le matin.

Malheureusement, j’ai moi-même connu, et observé autour de moi, beaucoup de souffrance au travail. Mais ce qui est intéressant, c’est que cette souffrance ne venait jamais d’un manque de compétences sur le poste. En revanche, elle provenait systématiquement d’un décalage entre la personne et son environnement de travail. Cela veut dire plusieurs choses : peut-être que la personne n’était pas en phase avec les valeurs de l’entreprise ou de son manager, peut-être qu’elle ne se sentait pas bien dans son équipe, ou peut-être que le poste qu’elle occupait ne lui correspondait plus du tout. On la laissait là, sans lui donner la possibilité de faire autre chose.

J’ai développé, au fil des années, la conviction que le recrutement joue un rôle clé pour résoudre cette problématique. La manière dont on recrute n’a pas vraiment évolué depuis des décennies, alors que le monde du travail, lui, a totalement changé. Aujourd’hui, on recrute principalement en se focalisant sur les compétences. On rédige une fiche de poste, on trie des CV, puis on passe aux entretiens. Si l’entretien est bien mené, on explore d’autres éléments, comme la motivation ou les valeurs mais le premier filtre reste basé sur les compétences.

Pendant l’entretien, on veut souvent s’assurer que la personne saura tenir le poste, sans avoir besoin de six mois de montée en compétences. Or, c’est là que ça coince, car on ne rencontre pas véritablement un être humain, mais un professionnel, un expert. Cela empêche de prendre une décision éclairée sur la véritable envie de travailler ensemble et sur l’alignement entre le candidat et l’entreprise. Je ne crois pas à un alignement parfait à 100 %, mais il est essentiel de se dire les choses de manière transparente. Par exemple, un candidat pourrait expliquer : « Mon mode de fonctionnement, c’est cela ». Et l’employeur pourrait répondre : « Notre entreprise n’est pas parfaite, nous avons tels enjeux et telles difficultés ». Prendre le temps de se rencontrer de manière authentique, au-delà des compétences et de l’expertise pure, c’est vraiment le cœur de EKOO.

Depuis le début, je parle de la « rencontre » comme étant au cœur du recrutement. C’est là que se crée la confiance et l’authenticité. On peut impliquer l’équipe dès le départ et en profiter pour renforcer la dynamique collective, car, aujourd’hui, le recrutement est souvent fait par le manager ou le RH, mais on ne travaille pas assez sur la cohésion d’équipe. Il s’agit donc d’une rencontre, non seulement entre un candidat et une entreprise, mais aussi entre un candidat et une équipe.

 

Quels sont les principaux services que EKOO propose à ses clients ?

Ces services évoluent. Au départ, j’ai développé une méthode que j’ai appelée « le recrutement sans CV », cela a beaucoup marqué les esprits. J’ai donc cette étiquette « recrutement sans CV », alors que notre offre va bien au-delà de cela.

Je suis capable de faire un recrutement comme tout autre cabinet : je recueille le besoin, je fournis une short-list et je peux même accompagner l’intégration des candidats. Mais il existe une offre plus pertinente à mes yeux, que j’ai découverte au fil du temps avec les clients : transmettre un savoir-faire, leur apporter une transformation des pratiques, plutôt que de faire le travail à leur place. J’accompagne davantage dans la redéfinition du besoin, car souvent, on ne passe pas assez de temps à bien comprendre ce dont on a vraiment besoin. Et j’insiste beaucoup sur la récolte des attentes de l’équipe, ce qui est rarement fait.

En tant que facilitatrice, j’anime cette discussion pour tout poser à plat. Cela amène parfois à annuler le besoin de recrutement, car on se rend compte que les ressources sont déjà en interne, mais qu’il faut réorganiser ou redistribuer les rôles. Il y a donc une phase de gouvernance, du conseil, et de facilitation pour clarifier ce besoin. Ensuite, j’aide à réfléchir sur les filtres à utiliser pour attirer des candidats qui ne seraient pas évidents sur le papier, et pour différencier l’entreprise dans un marché concurrentiel.

Enfin, j’aide aussi à adapter la posture en entretien, à mener les entretiens de manière plus authentique, à casser ce « jeu de séduction », afin de réduire les risques de déception une fois que la collaboration a débuté.

 

Comment avez-vous découvert Opus Fabrica ? Qu’est-ce qui vous a intéressé dans notre approche ?

Plusieurs personnes de mon réseau professionnel m’ont parlé d’Opus Fabrica comme une évidence par rapport aux valeurs que je porte et à la vision que je développe.

Début 2024, j’ai pris deux stagiaires de l’Université Jean Jaurès, en Master 1 de Psychologie Sociale du Travail et des Organisations, qui sont venus étudier ma méthode. Ils ont révélé et confirmé que ce que je mets en place dans ma méthodologie est en lien avec ce que dit la recherche sur l’amélioration du recrutement, mais aussi sur la cohésion d’équipe. Donc je me suis dit qu’il était temps de rencontrer Opus Fabrica, d’autant plus que je sentais que mon projet avait atteint une certaine maturité et que c’était le bon moment pour en parler. Je suis ravi d’avoir franchi ce pas, car nous sommes très alignés sur la vision et l’impact que nous cherchons à avoir, sans aucun doute. Surtout, nos expertises sont très complémentaires.

Tout ce que j’ai commencé à mettre en place va bénéficier de l’expertise d’Opus, qui viendra bonifier mes actions. Par exemple, créer des formats de formation est bien plus compliqué seul, donc leur apport en termes d’expertise et de méthodologie enrichira considérablement le contenu des formations, c’est certain. Cela est vrai aussi pour une approche conseil, car les clients que nous adressons partagent les mêmes points de douleur et les mêmes besoins. C’est donc formidable de pouvoir leur offrir un service cohérent qui réponde à l’ensemble de leurs problématiques. En tout cas, il est apparu évident que nous avions de nombreuses choses à développer ensemble.

 

Y a-t-il eu un moment particulier ou un projet spécifique qui a déclenché l’idée d’une collaboration entre nos deux entreprises ?

Je dirais que c’était vraiment la rencontre. En discutant, on s’est rendu compte que nous avions les mêmes projets et les mêmes envies, comme organiser un événement marquant autour de ces sujets ou lancer une offre de conseil. Pour ma part, il s’agit de développer de la formation. Tous les projets que nous avions chacun de notre côté pouvaient être mutualisés, car nous partageons les mêmes valeurs. C’est très précieux.

Quelles similitudes ou complémentarités avez-vous identifiées entre l’approche de Parents&Companies et celle d’Opus Fabrica ?

La première chose qui me vient à l’esprit, et je ne suis pas une experte, c’est que chez OPUS, l’humain est vraiment au cœur. Vous permettez de créer des espaces de sécurité où les gens peuvent se poser et, en se posant, avancer sur leurs problématiques individuelles ou collectives. C’est, en tout cas, comme ça que je perçois votre approche.

C’est exactement cet ADN que j’apporte dans le recrutement, que ce soit pendant les entretiens ou lorsque je facilite une discussion d’équipe. L’idée est de se dire qu’on n’a pas à retenir des informations importantes sous prétexte qu’on est RH, recruteur ou manager. Il faut tout dire, sans calcul, pour proposer ces espaces de sécurité psychologique, mieux se rencontrer et faire des choix plus éclairés. Je pense que c’est cet ADN commun que nous partageons.

Comment décririez-vous la synergie entre nos deux approches dans le cadre de nos collaborations ?

Lorsque je travaille sur un sujet de recrutement et que je détecte des signaux faibles – c’est un peu le cœur de mon approche grâce à mon expérience en RH –, je peux me rendre compte que certaines problématiques sous-jacentes, si elles ne sont pas traitées, entraîneront du turnover ou du désengagement.

Dans ce genre de cas, il serait pertinent de faire appel à Opus Fabrica pour l’accompagnement des équipes. Pour moi, c’est une approche très transversale. Je souhaite apporter aux clients une vision globale, pas seulement accomplir ma mission et partir. Si, de mon point de vue externe, j’identifie des choses qui pourraient poser problème à l’avenir, je les adresserai avec eux.

Pour nous, le recrutement augmenté, c’est la force de nos deux expertises réunies qui permet de remettre l’intelligence humaine au cœur de l’entreprise. C’est presque provocateur, parce que lorsqu’on parle de recrutement augmenté, on pense spontanément à l’intelligence artificielle. C’est un peu à contre-courant de cette idée, pour dire : attention, sur cette problématique, les outils ne vont pas nous remplacer ni tout résoudre. Ce qui devient de plus en plus précieux, c’est cet art de créer de véritables rencontres humaines.

Pour nous, le recrutement augmenté, c’est la fusion entre une expertise RH, plus orientée compétences, et une expertise en psychologie du travail et des organisations, qui apporte une dimension relationnelle et humaine.

 

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