Pour donner du sens à son travail, chaque personne a besoin de pouvoir être un acteur responsable de son travail et pour cela il faut pouvoir agir en autonomie. Ce besoin s’exprime de plus en plus fortement et ouvertement, remettant en question les modalités du management et de l’organisation du travail.
Derrière le phénomène de « grande démission » qui laisse tant d’entreprises sidérées et perplexes, il y a certes l’épuisement psychologique post-crise et le questionnement existentiel sur le sens, mais il y a probablement aussi la volonté de (re)trouver une plus grande liberté d’accomplissement dans le travail. En témoigne le nombre grandissant de création de micro-entreprises. Le site de l’INSEE indique qu’en 2021 le nombre de créations d’entreprises en France a atteint un nouveau record avec 995 900 créations ! Comme pour les années passées, cette hausse est principalement due à l’essor des immatriculations d’entreprises individuelles sous le régime du micro-entrepreneur.
Que cherchent toutes ces personnes en quittant leur poste de salarié pour créer leur propre entreprise sinon la liberté et l’autonomie ?
Le Graal du CDI n’est plus d’actualité. Les contraintes qu’imposent les organisations traditionnelles du monde du travail ne rendent plus le salariat désirable: morcellement des tâches, absence de participation à la chaine complète de valeurs, dictat des chiffres et du reporting, contrôle du travail, soumission aux ordres (mêmes lorsqu’ils sont aberrants), subordination, jeux de pouvoirs internes, etc… Tout ceci est trop cher payé pour une prétendue sécurité de l’emploi qui n’en est finalement pas une, notamment lorsqu’elle se fait au détriment de la santé physique et mentale des personnes.
Cela signifie-t-il pour autant que le temps de l’entreprise est révolu ?
Certainement pas! Mais le modèle de la subordination consentie et des visions tayloriste et fordiste du travail ne répondent plus aux aspirations des personnes ni au modèle de notre société contemporaine. Si elles veulent survivre et prospérer, les entreprises vont devoir opérer une profonde mue.
Le leadership éthique va remplacer le management hiérarchique pour intégrer de nouveaux paramètres relationnels centraux:
- l’entreprise « archipel » : la nouvelle richesse humaine de l’entreprise va associer des statuts variés (salariés et des free-lance), dans des lieux différents (en présentiel, en télétravail ou en full remote), avec une diversité de profils (diversité culturelle, générationnelle, cognitive) et une forte attente de reconnaissance des singularités.
- l’autonomie : quel que soit le statut contractuel du collaborateur, l’autonomie de chacun dans l’accomplissement de son travail va devenir une exigence centrale. Le modèle de l’artisanat est probablement une source d’inspiration féconde pour repenser le management : autonomie dans l’organisation de son travail, maîtrise de l’ensemble des tâches, créativité, contact avec l’utilisateur final (client interne ou externe), responsabilité.
- la coopération: dans cette nouvelle sociologie du travail, le management consistera surtout à animer une communauté pour qu’autonomie ne rime pas avec individualisme et pour que la mission de l’entreprise demeure un projet et une aventure collective au service d’un impact positif sur la société. La coopération devra également s’incarner dans la stratégie de l’entreprise avec une démarche collaborative ancrée dans une plus grande transparence, dans le partage, dans la confrontation positive et l’écoute des parties prenantes.
Ce changement de modèle est une transformation structurelle et culturelle profonde qui ne peut ni se décréter ni s’opérer du jour au lendemain. Cela va nécessiter un accompagnement dans la durée de tous les acteurs de l’entreprise: les dirigeants, les managers et les collaborateurs.
Car il s’agit de changer la façon de travailler ensemble.
Nathalie BARDOUIL, présidente OPUS Fabrica
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